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23.05.14 - 22.06.14
Exposition — Hôtel-Dieu

Exposition d'Elsa Sahal à l'Hôtel-Dieu. Crédits photo Nicolas Brasseur, Festival international d'art de Toulouse 2014 ©Le Printemps de septembre

Exposition d'Elsa Sahal à l'Hôtel-Dieu. Crédits photo Nicolas Brasseur, Festival international d'art de Toulouse 2014 ©Le Printemps de septembre

Nus couchés (2014) Elsa Sahal. Crédits photo Nicolas Brasseur, Festival international d'art de Toulouse 2014 ©Le Printemps de septembre

Autel (2012) Elsa Sahal. Courtoisie de la Galerie Claudine Papillon. Crédits photo Nicolas Brasseur, Festival international d'art de Toulouse 2014 ©Le Printemps de septembre

Exposition de Georges Jeanclos à l'Hôtel-Dieu. Scénographie de Romain Guillet. Crédits photo Nicolas Brasseur, Festival international d'art de Toulouse 2014 ©Le Printemps de septembre

Exposition de Georges Jeanclos à l'Hôtel-Dieu. Scénographie de Romain Guillet. Crédits photo Nicolas Brasseur, Festival international d'art de Toulouse 2014 ©Le Printemps de septembre

Exposition de Georges Jeanclos à l'Hôtel-Dieu. Scénographie de Romain Guillet. Crédits photo Nicolas Brasseur, Festival international d'art de Toulouse 2014 ©Le Printemps de septembre

Tambour (1994) Georges Jeanclos. Collection privée. Crédits photo Nicolas Brasseur, Festival international d'art de Toulouse 2014 ©Le Printemps de septembre

Dans les salles de l’Hôtel-Dieu, un dialogue se tisse entre deux sculpteurs de générations différentes, Georges Jeanclos et Elsa Sahal : ils se sont croisés aux Beaux-arts de Paris, où la seconde fut l’élève de son aîné. D’un même amour pour la terre, émergent leurs deux univers fort différents, figuratif, méditatif, symboliste voire mystique pour l’un, organique et coloré, drolatique ou inquiétant pour l’autre. Petites figures d’un côté et grands formats de l’autre montrent autant de facettes de ces approches personnelles de la sculpture, dont il s’agit, à la faveur d’un tel rapprochement, de percevoir les tensions et les résonances.
 
Dans « L’atelier », Georges Jeanclos a décrit la dimension physique constitutive de son travail, la manipulation des « dix kilos de terre molle », la «frappe oblique » sur le sol qui permet de former des plaques : « Le sol résonne et la terre s’allonge. Il me faut calculer, au centimètre près, cette attaque au sol qui permet de tendre la matière, de faire apparaître cette mémoire de la terre, où chaque geste est enregistré, mémorisé, de tirer des profondeurs de la matière même le souvenir, les remords. Tous les actes manqués, filtrés, réapparaissent sous l’effort. » Un effort que l’on est loin de soupçonner tant ces sculptures frappent davantage par leur fragilité : elles doivent celle-ci au travail à la plaque développé par l’artiste, à leur centre vide qui les fait parfois s’effondrer en cours d’exécution, mais aussi aux motifs (urnes, dormeurs, amoureux, enfants…) qui y apparaissent, la matière dont ils s’extirpent menaçant à chaque instant de les engloutir de nouveau. Ancrée dans une histoire universelle de l’art, l’œuvre de Jeanclos, travaillée par sa culture juive, est une réponse au traumatisme fondateur que fut la Seconde Guerre mondiale. D’où l’impression que, par ce travail titanesque aux productions si délicates, il vise à une forme de réparation, lui qui écrivait : ‹ Terre d’en bas, je cherche à te lever vers ce monde en haut, que je ne connais pas.› De l’enseignement de Georges Jeanclos, Elsa Sahal a retenu les séances de dessin au Louvre où il apprenait à ses élèves à « voir l’harmonie des formes », à « inventer et à ne surtout pas refaire ». Elle se souvient également qu’il dirigea, dans les années 1970, l’atelier de recherche de la manufacture de Sèvres, et oeuvra  ainsi au renouveau de la céramique dont elle explore et réalise, depuis le début des années 2000, les possibilités contemporaines. C’est qu’elle y a trouvé une technique accordée à sa volonté de faire des sculptures « en grand » et de « confronter son corps à quelque chose qui se métamorphose », tout en enregistrant l’énergie de l’action. Telles sont les caractéristiques les plus apparentes de ses sculptures qui mettent en œuvre des formes indéfinissables quoique évocatrices (de facettes variées de la vie biologique), mues par un indéniable élan vital qui les place sous le signe de la transformation incessante. Les allusions sexuelles y sont nombreuses, comme dans l’univers d’Elmar Trenkwalder, mais à la différence près – et elle est de taille –, que nées de la main d’une femme, vulves et  verges résonnent de façon fort différente. C’est également le fait de l’humour, scatologique et volontiers potache, développé par l’artiste, de son exploration aussi, par la couleur, des frontières labiles entre bon et mauvais goût. Autant de défis aux conceptions conventionnelles de la sculpture qu’elle n’a de cesse de questionner.

Remerciements: Mathilde Ferrer